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Lit(u)anie des pierres

Je suis hantée par la disparition de la mémoire d’un peuple.


Avant l'avènement du National Socialisme, se trouvait en Lituanie la plus grande communauté juive d’Europe.

C'est celle qui fut le plus décimée par les nazis.

Et comme cette horreur n’a pas suffi, Staline et ses sbires ont ensuite rajouté généreusement une couche de persécutions,

de tortures, de malheurs dans ce pays meurtri. Étrangement, comme si la nature humaine en ce pays avait atteint ses limites,

ces deux immenses souffrances ne se sont pas additionnées : la deuxième, la plus récente, a édulcoré —que dis-je ?—

gommé la première.  Au Musée du Génocide de Vilnius, le mot juif n’est même pas mentionné.
L’on n'y parle que des —insoutenables— pratiques du KGB. C’est à pleurer.
Alors à tout prix j’ai voulu trouver des traces, des lambeaux d'Histoire(s).
Beaucoup de pas pour rien.
Du ghetto il ne reste qu’une plaque.
À Paneriai quand même, au sortir de la ville, un mémorial dans la forêt somptueuse.
Un mémorial pour moi toute seule : pas un seul autre pérégrin.
Tant mieux : personne n’a vu mes larmes lorsque j’ai compris que je marchais au dessus d’un charnier.
 
À Kaunas, le chauffeur de taxi n'a pas compris où je souhaitais me rendre, pas plus qu'il ne connaissait l'existence du 9e Fort.
Désolé, il m'a remboursé ma course. Ah ! Kafka aurait bien ri de mes recherches vaines.
Dans la rue où il m'a laissée, n’ont survécu que les nombres pairs et je voulais trouver le numéro 73.
Mais peut-être n’ai-je pas su bien chercher.
Quant à la synagogue —la seule qui reste, dans la capitale de la Lituanie— elle était fermée, malgré les horaires affichés
qui prétendaient le contraire.
Ce jour-là ma soupe à la betterave eut un goût amer
Un petit cimetière juif enfin à Klaipéda : mais rien à voir avec la Shoah ; au moins était-il paisible.
Je me suis écorché les mains sur les pierres.
Alors j’ai marché plus loin.
Et fini par rencontrer des sorcières très baltiques, sur leur colline.
Mais c’était sûrement un rêve, nul ne voudra me croire.
C’était au temps d’avant le temps, quand les rituels étaient païens, quand les dieux avaient de l’humour.
La religion n'engendrait pas de mise à mort certaine et programmée, et même si de temps en temps le Dieu du Tonnerre

par exemple était un peu nerveux, sa foudre heureusement était parcimonieuse.
Il était trop saoul pour en faire un système. Ou complètement stoned.
D’où ces jardins statuaires.

Projet en cours : nouveau voyage et donc nouvelles images à venir en 2018

Vilnius / Paneriaï /  Klaipėda

Klaipėda

Juodkrantė

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